Tensions diplomatiques entre la France et Haïti après des propos polémiques d’Emmanuel Macron
Une polémique diplomatique a éclaté entre la France et Haïti après des propos jugés déplacés du président Emmanuel Macron en marge du sommet du G20 à Rio. Dans une vidéo amateur devenue virale, le chef de l’État français a qualifié les responsables haïtiens de « complètement cons », suscitant une vive réaction de Port-au-Prince.
Un échange tendu en marge du G20
L’incident remonte à mercredi 20 novembre. Alors qu’il quittait le sommet du G20 au Brésil pour se rendre au Chili, Emmanuel Macron a été interpellé par un Haïtien qui l’accusait, lui et la France, d’être responsables de la crise profonde en Haïti. Selon la vidéo, le président a rétorqué : « Là franchement, c’est les Haïtiens qui ont tué Haïti, en laissant le narcotrafic. Et là, ce qu’ils ont fait, le Premier ministre était super, je l’ai défendu, ils l’ont viré ! » Il faisait référence au limogeage, le 10 novembre dernier, de Garry Conille, Premier ministre haïtien en poste depuis cinq mois.
Poursuivant, Emmanuel Macron a ajouté : « Ils sont complètement cons, ils n’auraient jamais dû le sortir, le Premier ministre était formidable », avant que l’enregistrement ne s’interrompe. Ces propos ont provoqué une onde de choc dans un pays déjà plongé dans une crise politique, économique et humanitaire.
Face à ces déclarations, les autorités haïtiennes ont exprimé leur indignation. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Victor Harvel Jean-Baptiste, a convoqué jeudi l’ambassadeur de France en Haïti, Antoine Michon, et lui a remis une lettre de protestation adressée au ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. « Ces propos sont inacceptables et constituent un geste inamical », a déclaré le ministère dans un communiqué.
Selon ce dernier, l’ambassadeur français a reconnu que les déclarations du président étaient « malheureuses ». Haïti a exigé une clarification officielle de la part de la France.
Macron réaffirme son soutien à Haïti
En déplacement au Chili, Emmanuel Macron a tenté d’apaiser les tensions. Lors d’un discours prononcé devant le Congrès chilien, il a déclaré : « La France continuera d’apporter son soutien au peuple haïtien et de soutenir toutes les initiatives visant à rétablir la sécurité et recréer un chemin vers une situation politique stable. Les Haïtiens le méritent. »
Cependant, ce geste suffira-t-il à calmer l’indignation haïtienne ? Le pays est actuellement gouverné par le Conseil présidentiel de transition (CPT) depuis la démission en avril dernier de l’ex-Premier ministre Ariel Henry, sur fond de violences liées aux gangs et d’instabilité politique. Le remplacement de Garry Conille par l’homme d’affaires Alix Didier Fils-Aimé, contre l’avis du Premier ministre sortant, a encore exacerbé les tensions internes.
Cette crise diplomatique met en lumière la fragilité des relations franco-haïtiennes. Alors que Haïti traverse une période de chaos sans précédent, les propos du président français risquent de renforcer le ressentiment contre une France souvent perçue comme paternaliste.
Pour Paris, cet épisode illustre les défis d’une politique étrangère dans un contexte de tensions historiques et de susceptibilités exacerbées. Quant à Port-au-Prince, cette affaire pourrait être un moyen de galvaniser un sentiment d’unité nationale face à ce qui est perçu comme une ingérence étrangère.