Le retour inattendu de la comédie musicale au cinéma : Joker 2 et Emilia Perez ouvrent la voie

30 septembre, 2024 / Alice Leroy

Cet automne, la comédie musicale fait un retour remarqué au cinéma grâce à deux films phares : Joker : Folie à Deux de Todd Phillips, où Lady Gaga partage l’affiche avec Joaquin Phoenix, et Emilia Perez, le long-métrage audacieux de Jacques Audiard, qui a été choisi pour représenter la France aux Oscars. Ces deux œuvres témoignent d’une volonté de réinventer un genre longtemps délaissé. Est-ce le début d’un véritable renouveau ?

Des comédies musicales hors des sentiers battus

Bien que Lady Gaga refuse de qualifier Joker : Folie à Deux de véritable comédie musicale, la musique occupe une place centrale dans le film. « Nous avons utilisé la musique pour que les personnages expriment ce qu’ils ressentent, car le dialogue ne suffisait pas », a-t-elle expliqué à l’AFP lors du Festival de Venise. À contre-courant des comédies musicales classiques, les chansons sont interprétées en direct sur le plateau, sans les habituels playbacks, afin d’apporter une touche d’authenticité et de fragilité à l’ensemble.

De son côté, Jacques Audiard propose avec Emilia Perez un film musical aux codes éclatés, rythmé par du reggaeton et des chorégraphies dignes de clips vidéo. « Je ne savais pas si on faisait une comédie musicale ou un opéra », confie le réalisateur à l’AFP. Emilia Perez raconte l’histoire d’un baron de la drogue mexicain qui décide de changer de vie pour devenir une femme, un récit aussi radical que novateur, incarné par Zoë Saldaña, Selena Gomez et l’actrice transgenre Karla Sofía Gascón.

Un genre en quête de succès

Hollywood continue de produire des comédies musicales, mais les résultats au box-office sont difficiles à prévoir. Si des films comme La La Land ou Mamma Mia! ont rencontré un large succès, d’autres, comme le remake de West Side Story par Steven Spielberg, ont peiné à trouver leur public. Le coût de production élevé, les enregistrements répétés et les nombreuses scènes chorégraphiques rendent ces œuvres complexes à rentabiliser.

Cependant, des projets plus récents montrent que le public peut encore être séduit. Le film Wonka, avec Timothée Chalamet, a attiré de nombreux spectateurs, tout comme Wicked, l’adaptation de la comédie musicale à succès de Broadway prévue pour la fin de l’année, avec Ariana Grande et Cynthia Erivo.

La France tente sa chance

En France, le réalisateur Mathieu Kassovitz se lance dans une aventure inédite en adaptant La Haine en comédie musicale pour la scène. « On essaye de casser un petit peu tout ça et de ne pas respecter forcément les règles et les coutumes de ce format », a-t-il déclaré à l’AFP. Ce projet ambitieux reflète une envie de moderniser le genre tout en conservant la force du message original du film.

Un retour durable ?

Si la comédie musicale ne semble pas prête à retrouver l’âge d’or des années 1930 à 1950, où Hollywood produisait des centaines de films du genre, elle montre aujourd’hui une capacité à se renouveler. « Ces films permettent de mettre en scène des personnages hors du commun, bigger than life, tout en jouant avec les attentes du public », souligne Alexis Lormeau, auteur de Chante et danse au cinéma (Éditions Apprimerie).

Le succès de Joker : Folie à Deux et Emilia Perez pourrait-il être le prélude à une nouvelle ère pour la comédie musicale ? Les spectateurs décideront, mais il est certain que le genre, dans sa forme revisitée, a encore beaucoup à offrir.

Alice Leroy