Darmanin met en garde Barnier sur les impôts et trace une nouvelle voie politique

29 septembre, 2024 / Entrevue

À deux jours de la déclaration de politique générale de Michel Barnier à l’Assemblée nationale, Gérald Darmanin a choisi sa rentrée politique pour adresser une mise en garde claire au Premier ministre, en avertissant contre toute hausse d’impôts. « Nous serons nombreux à ne pas pouvoir soutenir un gouvernement qui augmenterait les impôts », a-t-il déclaré dimanche à Tourcoing, son fief électoral, devant environ 500 personnes, dont Édouard Philippe et Élisabeth Borne.

Malgré son soutien affiché au gouvernement Barnier, Darmanin a insisté que l’augmentation des impôts, même si elle ne concernait que les plus aisés, irait à l’encontre des réalisations positives de ces dernières années. Selon lui, l’argent des plus riches devrait être utilisé pour créer des emplois, et non alimenter les caisses publiques.

Dans le même discours, Darmanin a annoncé la création d’un « lieu de réflexion » nommé « Populaires », un espace qui, selon son entourage, n’est pas un parti ni un courant politique au sein de Renaissance, le parti présidentiel, mais vise à développer des idées pour reconnecter avec les classes populaires. « Le bloc central que nous représentons est en rupture avec les personnes modestes, les travailleurs », a-t-il regretté, soulignant le danger de voir ces populations se tourner vers des extrêmes politiques.

Des propositions pour une politique sociale

Pour illustrer sa volonté de défendre les travailleurs sans verser dans la rhétorique nationaliste, Darmanin a proposé de donner la « préférence aux travailleurs » au lieu de la « préférence nationale » prônée par le Rassemblement national. Parmi ses propositions phares figure également la suppression de la prime d’activité, qui serait transformée en baisse de charges sociales afin d’entraîner une « augmentation raisonnable du SMIC ».

Darmanin a également suggéré la création d’un « 1% handicap », inspiré du dispositif du « 1% logement », pour aider les familles confrontées aux difficultés liées au handicap. Concernant les aides sociales, il a plaidé pour un versement social unique, limité à 75 % du SMIC, afin de rendre le travail toujours plus avantageux que l’assistanat.

« Reprendre sa liberté » et préparer l’avenir

Après avoir été écarté des principaux postes du nouveau gouvernement, Darmanin semble avoir retrouvé une certaine liberté d’action. Entouré de quelques figures du camp présidentiel comme Édouard Philippe, il tente désormais de se positionner dans l’équation politique en vue de l’élection présidentielle de 2027. Ses proches affirment qu’il se prépare activement, se lançant « dans l’aventure vers l’Élysée ».

Cependant, Darmanin peine à obtenir des résultats probants dans ses initiatives récentes, que ce soit pour créer un nouveau groupe à l’Assemblée ou pour diriger les députés Renaissance. Sa relation avec Michel Barnier semble aussi tendue, particulièrement après sa menace de censurer le gouvernement si une hausse des impôts venait à être appliquée.

Pour regagner la confiance des classes populaires, Darmanin s’appuie sur son passé familial et social. Il évoque souvent sa mère, ancienne femme de ménage, ou son grand-père tirailleur algérien, pour illustrer sa proximité avec les réalités des plus modestes. Cette approche vise à séduire l’électorat ouvrier et employé, dont il espère que le soutien pourrait faire basculer la prochaine élection présidentielle. Son modèle politique semble inspiré de Nicolas Sarkozy en 2007, qui avait réussi à capter ces électorats grâce à un discours mêlant sécurité et justice sociale.

Bien que certains critiques y voient une posture électoraliste, ses proches défendent cette approche, arguant que « personne ne parle aujourd’hui aux classes populaires » sur des sujets aussi fondamentaux que le pouvoir d’achat ou la justice sociale. Ce positionnement pourrait, espèrent-ils, lui donner un avantage stratégique en vue de 2027.

Une période de réinvention

Pour l’instant, Darmanin doit naviguer sans soutien explicite au sein du gouvernement. Des alliés potentiels, pressentis pour des postes clés, ont été écartés de l’exécutif, limitant sa capacité à influencer les décisions du gouvernement. Pourtant, ses partisans restent optimistes. « Avoir une traversée du désert n’empêche pas de revenir au firmament », confie Alexandre Vincendet, en comparant son parcours à celui de Nicolas Sarkozy.

Dans ses discours, Darmanin semble vouloir se réinventer en promouvant un capitalisme où « le salarié heureux est le but collectif ». Il appelle à une grande conférence sociale entre le patronat et les syndicats pour définir ce nouveau modèle économique.

Même s’il semble envisager une candidature en 2027, la route de Darmanin reste semée d’embûches. Pour l’instant, il maintient une relation de proximité avec Édouard Philippe, potentiellement en vue de futurs soutiens mutuels. « L’amitié, ce n’est pas le soutien », lance cependant un proche, rappelant que rien n’est acquis politiquement.

En conclusion, la rentrée politique de Gérald Darmanin marque une tentative de repositionnement ambitieux. Désormais député du Nord, il espère conquérir un espace politique en défendant la « droite sociale et populaire », avec l’espoir de rester un acteur majeur du jeu politique à trois ans de la prochaine présidentielle.