Déficit public : Bruxelles accorde un répit à la France, mais l’heure des choix difficiles approche

24 septembre, 2024 / Entrevue

Le gouvernement français a obtenu un délai supplémentaire de la Commission européenne pour présenter son plan de réduction du déficit public. Initialement attendu pour le 20 septembre 2024, ce plan ne devra finalement être soumis qu’à la fin octobre. Ce report offre un petit répit au gouvernement de Michel Barnier, tout juste en place, face à une situation financière préoccupante.

Un déficit public en augmentation inquiétante

En 2023, la France a enregistré un déficit public de 5,5 % de son PIB, dépassant largement la limite des 3 % imposée par le Pacte de stabilité et de croissance de l’Union européenne. Comme six autres États membres – la Belgique, l’Italie, la Hongrie, la Pologne, la Slovaquie et Malte – elle a été placée sous procédure pour déficit public excessif en juillet dernier. Ces pays étaient tenus de présenter un plan pour redresser leur situation avant le 20 septembre. Cependant, dès le début du mois, Paris avait sollicité un report, conscient que ce délai serait difficile à tenir en raison de l’absence d’un gouvernement stable.

Le nouveau gouvernement de Michel Barnier, formé après plusieurs semaines de tractations, doit désormais s’atteler à cette tâche ardue. Le projet de loi de finances pour 2025 sera présenté le 9 octobre devant l’Assemblée nationale, avec pour objectif de ramener progressivement le déficit sous la barre des 3 % d’ici 2027. Cependant, cet objectif semble de plus en plus irréaliste.

Les dernières prévisions de Bercy, publiées par Les Echos, estiment que le déficit public atteindra 6 % du PIB en 2024, bien au-delà des 5,1 % visés par le gouvernement précédent. Cette situation exacerbe les inquiétudes quant à l’impact de la dette sur les finances publiques et sur la liberté d’action économique du pays. Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, a récemment tiré la sonnette d’alarme, déclarant que le coût des intérêts de la dette allait bientôt dépasser les dépenses pour l’éducation. « Si on continue ainsi, on condamne l’avenir de la France et la liberté des Français », a-t-il averti.

Un chemin semé d’embûches

La tâche du nouveau gouvernement ne sera pas simple. Le précédent exécutif avait promis de réduire le déficit à 4,1 % en 2025, avec une trajectoire sous les 3 % en 2027. Mais cette ambition est remise en cause. Selon François Villeroy de Galhau, un retour sous la barre des 3 % en seulement trois ans est irréaliste et risquerait de freiner la croissance économique. Il suggère plutôt de se fixer un horizon de cinq ans pour atteindre cet objectif, ce qui nécessiterait une réduction annuelle de 20 milliards d’euros.

Pour y parvenir, la France devra principalement réduire ses dépenses publiques. Toutefois, le gouverneur estime également qu’une hausse des impôts, ciblée sur les grandes entreprises et les contribuables les plus fortunés, ne devrait pas être exclue. Cette mesure permettrait d’alléger la pression sur les classes moyennes et les petites et moyennes entreprises (PME), tout en contribuant à remettre les finances publiques sur les rails.

Alors que la date limite pour la présentation du plan a été repoussée à fin octobre, la pression reste forte sur le gouvernement. Les institutions européennes, à l’instar du président de l’Eurogroupe, Paschal Donohoe, insistent sur la nécessité pour la France de crédibiliser son engagement en matière de réduction des déficits.

Le 9 octobre prochain, Michel Barnier et son équipe devront démontrer aux députés leur capacité à redresser la situation avec la présentation du projet de loi de finances pour 2025. Ce moment sera crucial pour convaincre non seulement Bruxelles, mais également l’opinion publique française, que des mesures fermes et réalistes sont en cours pour éviter une dégradation économique plus profonde.