Verrouillage électoral en Tunisie : exclusion de trois adversaires de Kaïs Saied
La Tunisie connaît un nouveau bouleversement démocratique à l’approche de l’élection présidentielle du 6 octobre. L’autorité électorale tunisienne, l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (Isie), a annoncé ce lundi l’exclusion définitive de trois candidats perçus comme de sérieux concurrents du président sortant, Kaïs Saied. Cette décision a provoqué une onde de choc dans le pays, certains experts estimant que cela « verrouille » l’élection en faveur de Saied.
Les candidats exclus, Abdellatif Mekki, ancien dirigeant du mouvement islamo-conservateur Ennahdha, Mondher Zenaïdi, ancien ministre sous le régime de Ben Ali, et Imed Daïmi, conseiller de l’ex-président Moncef Marzouki, avaient été réadmis par le Tribunal administratif la semaine passée, à la surprise générale. Toutefois, l’Isie a justifié leur exclusion en affirmant que le Tribunal n’avait pas communiqué ses décisions dans le délai légal de 48 heures, rendant ainsi la liste finale « définitive et non sujette à recours ».
Cette exclusion a suscité des critiques sévères, certains y voyant une manipulation visant à favoriser Kais Saied. Le politologue Hatem Nafti a déclaré que cette décision « renforce l’impression d’élections verrouillées » et qu’elle démontre l’érosion de l’État de droit en Tunisie. De plus, l’interpellation d’Ayachi Zammel, l’un des trois candidats retenus, pour des soupçons de faux parrainages, renforce les soupçons d’ingérence politique.
Depuis son élection en 2019, Kais Saied est accusé de dérive autoritaire, notamment après avoir pris les pleins pouvoirs lors d’un coup de force le 25 juillet 2021. Ces événements ont soulevé des inquiétudes concernant l’avenir de la démocratie tunisienne, autrefois considérée comme un modèle dans le monde arabe.
Face à Saied, les deux autres candidats retenus, Zouhair Maghzaoui, ancien député de la gauche panarabe, et Ayachi Zammel, un industriel à la tête d’un petit parti libéral, semblent avoir peu de chances de remporter l’élection, d’autant plus que Zammel est désormais en détention. Pour certains observateurs, cette élection pourrait n’être qu’une « pure formalité » pour le président sortant.
Enfin, cette situation met en lumière les tensions croissantes au sein de l’élite tunisienne, entre partisans et opposants de Saied, avec des répercussions potentielles sur la stabilité du pays à court terme.