Expulsions des Vénézuéliens : une juge compare la politique de Trump au traitement des nazis

Expulsions des Vénézuéliens : une juge compare la politique de Trump au traitement des nazis

Une loi vieille de plus de deux siècles, des expulsions sans procès, des migrants assimilés à des terroristes, et une magistrate qui déclare à l’audience : « Les nazis ont bénéficié d’un meilleur traitement. » Ce lundi 24 mars, la juge fédérale Patricia Millett n’a pas mâché ses mots en dénonçant la politique migratoire brutale de l’administration Trump envers les ressortissants vénézuéliens.

Depuis février, plus de 1100 Vénézuéliens ont été renvoyés dans leur pays, dont 566 directement expulsés par les États-Unis, en vertu d’une disposition juridique quasiment jamais utilisée depuis sa création en… 1798. Il s’agit de l’Alien Enemies Act, partie des célèbres Alien and Sedition Acts, une loi de temps de guerre qui permet au président d’ordonner l’expulsion sans procès de tout étranger considéré comme une menace à la sécurité nationale. Elle n’avait été invoquée que trois fois dans l’histoire américaine, dont lors de l’internement d’Allemands et de Japonais pendant la Seconde Guerre mondiale.

Le retour de cette législation exceptionnelle dans le contexte migratoire contemporain a provoqué une onde de choc dans les milieux juridiques et humanitaires. À la cour d’appel, où l’administration Trump demandait la suppression du délai de deux semaines avant toute expulsion, la juge Millett a interrogé l’avocat du gouvernement sur l’absence de procédure contradictoire. En particulier, elle s’est inquiétée du fait que des migrants soient expulsés sans avoir pu contester leur prétendue appartenance au gang vénézuélien Tren de Aragua, classé organisation terroriste par Donald Trump.

La phrase qui a marqué l’audience : « Les nazis ont bénéficié d’un meilleur traitement en vertu de cette loi que ce qui se passe en ce moment. » Face à cette comparaison explosive, l’avocat Drew Ensign s’est contenté de dire : « Nous contestons cette analogie. »

La politique migratoire américaine prend un tour particulièrement brutal avec le Venezuela, pays avec lequel les États-Unis n’entretiennent plus de relations diplomatiques depuis 2019. Les premiers vols d’expulsion sont partis d’El Paso, Texas, le 10 février. Un autre vol est même parti de la prison de Guantánamo, avec 177 migrants transférés au Honduras avant d’être renvoyés au Venezuela. Certains, selon les autorités américaines, ont transité par le Salvador, soupçonnés d’avoir des liens avec des réseaux criminels transnationaux. Le gouvernement vénézuélien, lui, dément toute affiliation à des gangs pour la majorité des expulsés et dénonce une campagne de diabolisation des migrants.

En toile de fond : un bras de fer diplomatique larvé. Les États-Unis accusent Caracas de ne pas respecter les accords de rapatriement, pendant que le gouvernement Maduro fustige une politique impérialiste déguisée en lutte antiterroriste.

L’administration Trump, qui fait de l’immigration un axe central de sa campagne, assume ces mesures radicales. Mais le retour d’un dispositif d’exception hérité du XVIIIe siècle, appliqué de manière massive à des civils sans procès, suscite une indignation croissante, y compris dans les cercles judiciaires. La juge Millett n’a fait que poser tout haut une question que de nombreux observateurs se posent : jusqu’où peut-on aller au nom de la sécurité nationale ?

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