Pierre Moscovici appelle à un budget complet et ambitieux pour 2025
Le prochain budget de l’État s’annonce comme l’un des plus délicats de la Ve République, prévient Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes. Dans un entretien accordé au Parisien ce dimanche 8 septembre, l’ancien ministre socialiste appelle à une rupture dans la gestion des finances publiques, alors que le déficit et la dette continuent de grimper.
Face à l’ampleur des défis, Moscovici plaide pour un projet de loi de finances « complet et détaillé », à déposer « une ou deux semaines » après le 1er octobre, lorsque débutera la session ordinaire de l’Assemblée nationale. Ce délai supplémentaire permettrait d’élaborer un budget solide, répondant aux exigences du Haut Conseil des finances publiques, tout en évitant un simple prolongement des dépenses de l’année précédente.
Urgence budgétaire et trajectoire à redéfinir
Avec un déficit prévu de 5,6 % du PIB en 2024, et possiblement 6,2 % en 2025, Pierre Moscovici tire la sonnette d’alarme. Selon lui, la loi de programmation des finances publiques, qui prévoit un retour à un déficit inférieur à 3 % d’ici 2027, est « caduque ». Atteindre cet objectif exigerait des économies drastiques, à hauteur de 100 milliards d’euros en trois ans, un effort qu’il juge peu réaliste.
Moscovici préconise de revoir cette trajectoire, en repoussant l’objectif de 3 % au-delà de 2027, voire jusqu’en 2029. Il insiste sur la nécessité de réformes crédibles et de mesures sérieuses pour inverser la courbe de la dette, tout en évitant des coupes brutales dans les dépenses publiques.
Des économies intelligentes et un débat fiscal ouvert
Pierre Moscovici insiste également sur l’importance d’une approche équilibrée : réaliser des économies sans dégrader les services publics. « On peut faire des économies intelligentes », affirme-t-il, tout en avertissant que la solution ne viendra pas d’une croissance miraculeuse.
Quant à la fiscalité, Moscovici appelle à ne pas la considérer comme un sujet tabou. S’il estime qu’un alourdissement massif des impôts serait nuisible à l’économie française, il reconnaît la nécessité d’un débat entre le gouvernement et le Parlement sur cette question. « Si tu y vas, vas-y mollo et vise juste », conseille-t-il, prônant une approche mesurée.
Le risque d’un blocage institutionnel
Le président de la Cour des comptes alerte enfin sur les risques institutionnels en cas de rejet du budget par le Parlement. Si aucun projet de loi de finances n’est voté dans les 70 jours, le gouvernement pourrait être contraint de légiférer par ordonnances, ou de reconduire les dépenses de l’année précédente sans réduire le déficit. Un scénario qu’il juge périlleux, à l’heure où l’UE pourrait ouvrir une procédure contre la France pour non-respect de ses engagements financiers.
Pour Moscovici, il est donc impératif de prendre le temps nécessaire pour élaborer un budget ambitieux, tout en redressant durablement les finances publiques.