Le débat autour du rétablissement du scrutin proportionnel en France : une solution ou un risque pour la démocratie ?
Le débat autour du rétablissement du scrutin proportionnel refait surface en France, particulièrement à chaque crise politique. Pour certains, c’est l’antidote nécessaire à l’impasse politique actuelle, un moyen de mieux refléter la diversité des courants politiques dans l’Assemblée nationale. Hervé Marseille, figure centrale de la majorité sénatoriale, affirme que la proportionnelle pourrait être l’« élixir » pour sortir du marasme politique actuel.
Les avantages de la proportionnelle
Le scrutin proportionnel est couramment utilisé dans de nombreux pays européens, offrant certains avantages évidents. Il permet une représentation plus fidèle des divers courants politiques, favorise la parité, et en théorie, simplifie la formation de coalitions. Cette méthode, appliquée lors des législatives de 1986 par François Mitterrand, a permis l’élection de 35 députés du Front national, marquant ainsi l’entrée de ce parti à l’Assemblée nationale.
Les risques du retour à la proportionnelle
Cependant, la proportionnelle n’est pas exempte de risques. L’un des principaux dangers est le retour à un « régime des partis » que redoutait de Gaulle, semblable à celui de la IVe République. Le système proportionnel favorise les partis plutôt que les individus, créant ainsi une scène politique où les majorités sont formées davantage par les négociations interpartis que par le choix direct des électeurs.
Cela pourrait aussi engendrer une fragmentation accrue de l’Assemblée nationale, déjà divisée en onze groupes. La constitution d’une majorité stable deviendrait encore plus difficile, ce qui risquerait de conduire à une instabilité politique chronique.
Vers une « démocratie minoritaire » ?
Le passage à la proportionnelle pourrait également favoriser une « démocratie minoritaire », où de nombreux petits partis, même faibles, obtiendraient un poids institutionnel disproportionné. Chaque figure politique pourrait être tentée de créer son propre parti, multipliant ainsi les listes et compliquant le débat public.
De plus, la proportionnelle affaiblirait davantage l’ancrage territorial des députés, déjà ébranlé par la suppression du cumul des mandats. Les élus risqueraient de devoir leur réélection non pas à leur connaissance des problématiques locales, mais à leur position dans les structures partisanes.
Un débat anachronique ?
Enfin, certains experts estiment que ce débat est en décalage avec la réalité politique actuelle. Le bloc de gauche, par exemple, occupe aujourd’hui environ 30 % des sièges à l’Assemblée nationale, reflétant ainsi son poids électoral. Le rétablissement de la proportionnelle ne changerait probablement pas radicalement la composition de l’Assemblée, même si cela pourrait renforcer la présence du Rassemblement national.
En conclusion, bien que le scrutin proportionnel puisse sembler être une solution idéale pour sortir de l’impasse politique, il comporte des dangers cachés qui pourraient conduire à une instabilité accrue et à une fragmentation politique difficilement gouvernable.