Donald Trump, fraîchement réélu à la présidence des États-Unis, a initié une action en justice inédite contre Ann Selzer, une sondeuse de renom, ainsi que ses employeurs, le quotidien Des Moines Register et sa maison mère Gannett. L’affaire, portée devant un tribunal de l’Iowa lundi soir, vise à « demander des comptes pour une ingérence électorale flagrante » qui aurait favorisé Kamala Harris, candidate démocrate à la présidentielle de novembre.
Selon la plainte consultée par l’AFP, Ann Selzer est accusée d’avoir « fabriqué des données » montrant une avance de trois points pour Kamala Harris en Iowa. Ces chiffres avaient suscité un électrochoc à quelques jours du scrutin. Cependant, Donald Trump a finalement remporté cet État rural par une marge confortable de 13 points.
« C’était une fraude, une véritable ingérence électorale », a déclaré le républicain lors d’une conférence de presse lundi. Affirmant que Selzer était une experte reconnue, il a laissé entendre qu’elle aurait agi en pleine conscience des conséquences de ses actes. Trump demande également des dommages et intérêts dans cette affaire.
Une sondeuse sous le feu des critiques
Ann Selzer, longtemps considérée comme une autorité fiable sur les sondages en Iowa, n’a pas souhaité commenter l’affaire. Le Des Moines Register a, pour sa part, reconnu que le sondage en question n’avait pas « reflété la réalité des résultats finaux ». Toutefois, le quotidien assure que des analyses complètes des données ont été publiées et qualifie la plainte de « sans fondement ».
Lark-Marie Anton, porte-parole du journal, a déclaré : « Nous maintenons l’intégrité de notre travail journalistique et prévoyons de nous défendre vigoureusement contre ces accusations. »
Des spécialistes juridiques ont exprimé des doutes sur la viabilité de la procédure. Rick Hasen, professeur de droit à l’université de Californie à Los Angeles, a estimé que cette plainte avait peu de chances d’aboutir. Anna Diakun, avocate au sein de l’institut Knight pour la liberté d’expression à l’université Columbia, a également appelé à son rejet rapide, qualifiant l’action de tentative d’intimidation.
« Ce type de poursuite menace la liberté de la presse et vise à réduire au silence ceux que Donald Trump considère comme des adversaires politiques », a-t-elle déclaré dans un communiqué.
Une méfiance récurrente envers les médias
Depuis son entrée en politique en 2015, Donald Trump entretient une relation tendue avec les médias, souvent qualifiés de « corrompus » et d’« ennemis du peuple » par le milliardaire. Lors de sa conférence de presse, il a affirmé vouloir lancer d’autres actions en justice, notamment contre l’émission 60 Minutes de CBS News, qu’il accuse de manipulation en faveur de Kamala Harris.
Si cette plainte contre Ann Selzer est jugée sans précédent, elle s’inscrit dans une stratégie plus large de confrontation directe avec les institutions médiatiques, réaffirmant le style combatif qui caractérise Donald Trump.