La Corée du Sud s’apprête à vivre un épisode politique décisif alors que le Parlement votera samedi une motion de destitution contre le président Yoon Suk Yeol. Prévu à 17h (8h GMT), ce scrutin pourrait suspendre le chef de l’État de ses fonctions si la motion recueille les 200 voix nécessaires parmi les 300 députés. L’opposition, qui dispose de 192 sièges, devra convaincre au moins huit élus du Parti du pouvoir au peuple (PPP), actuellement au pouvoir, pour atteindre cet objectif.
Un contexte tendu et des précédents historiques
Cette tentative de destitution intervient dans un climat de crise politique aiguë. Le 3 décembre dernier, Yoon Suk Yeol avait provoqué une onde de choc en instaurant la loi martiale, un acte sans précédent depuis plus de quarante ans en Corée du Sud. Sous la pression du Parlement et de manifestants, il avait fait marche-arrière en seulement six heures. Cette décision controversée lui a valu d’être accusé de « rébellion » et placé sous enquête pénale, tout en étant interdit de quitter le pays.
Une première motion de destitution avait échoué le 7 décembre, le PPP ayant quitté l’hémicycle avant le vote, rendant impossible l’atteinte du quorum. Mais cette fois-ci, les tractations politiques et la pression populaire semblent mettre l’opposition en position de force.
Vendredi, Lee Jae-myung, chef du Parti démocrate et principal leader de l’opposition, a appelé les députés du PPP à « protéger la vie des citoyens dans les rues glaciales plutôt que de soutenir un président discrédité ». Son appel semble trouver un écho : sept élus du PPP ont déjà annoncé qu’ils voteraient en faveur de la destitution.
Si la motion est adoptée, le président sera suspendu de ses fonctions dans l’attente de la décision de la Cour constitutionnelle, qui disposera de 180 jours pour se prononcer. En cas de confirmation, Yoon Suk Yeol deviendrait le deuxième président sud-coréen à être destitué, après Park Geun-hye en 2017.
Une impopularité record
Selon un sondage Gallup publié vendredi, la popularité du président a atteint un plancher historique de 11%, avec 75% des sondés favorables à sa destitution. Depuis sa tentative de loi martiale, des dizaines de milliers de manifestants, issus de tous horizons, se rassemblent à Séoul pour demander sa démission. Parmi eux, Kim Sung-tae, ouvrier de 52 ans, affirme : « Nous nous battrons pour restaurer la démocratie », tandis que Kim Hwan-ii, enseignant, déplore : « Nous payons tous le prix de l’élection de ce président. »
Malgré la pression croissante, Yoon Suk Yeol refuse de plier. Lors d’une allocution télévisée jeudi, il a affirmé sa détermination à « se battre jusqu’à la dernière minute ». Mais que la motion de destitution soit adoptée ou non, les analystes estiment que le président ne pourra échapper à sa responsabilité pénale pour ce que certains qualifient d’« acte de rébellion ».
La Corée du Sud, encore marquée par les années sombres de la dictature militaire, traverse une période critique. L’issue de ce vote pourrait redéfinir l’avenir politique du pays et réaffirmer son engagement envers les principes démocratiques.